Samuel Wilde - The healing game

La curiosité est un vilain défaut que j'embrasse littéralement à pleine bouche. Elle régit ma vie comme le sucre régit celle d'un diabétique. Comme le Tylenol qui va hurler à la tête de se tenir tranquille, la curiosité me hurle de simplement céder et faire ce que je fais le mieux c'est-à-dire fourrer mon nez là où je ne devrais pas le faire. C'est maladif chez moi. Ça a toujours été le cas. On me parle de quelque chose que je ne connais pas, je veux en apprendre plus. On me montre quelque chose que je n'ai jamais essayé, je veux à tout prix y goûter. Il est évident que ça ne se termine pas toujours de la meilleure des façons qui soit, mais je n'ai pas envie de fixer le plafond sur mon lit de mort en me disant que je n'ai pas essayé tout ce que je me devais d'essayer. C'est en partie pour cette raison que j'ai fait médecine, parce qu'à mes yeux rien n'est plus fascinant que le corps humain et ses capacités. Ce n'est pas que pour ça, mais pour le reste il faudra attendre encore un peu. Pour l'heure on se concentre sur ma tête.

Ma tête qui n'est pas régie que par la curiosité. C'est un tout, un amoncellement de neurones bien distincts ayant de temps à autre un petit spasme et même si la zone 'à moi les connaissances et les nouvelles expériences' est bien trop souvent sollicité elle partage sa place avec, notamment, un certain charisme et un humour un peu trop souvent douteux et mal placé. Il faut ce qu'il faut pour détendre les patients un peu trop nerveux... ou Patch Adams a un peu trop marqué mon enfance. C'est au choix. Je suis aussi quelqu'un de ponctuel, minutieux, méthodique, réfléchis et débrouillard.

Tant de qualités. On croirait presque que je suis l'homme parfait, mais non. Désolé de briser vos espoirs d'homme à marier. Je suis un bavard, ce qui a tendance à en irriter plus d'un, immature, facilement influençable, manipulable, un brin trop dragueur et assurément trop imbu de ma personne pour mon propre bien. Mes connaissances qui me montent à la tête. Je ne suis probablement pas que ça, mais on ne se connait jamais totalement réellement donc pour le reste il faudra s'approcher et constater.

Je suis curieux. Je l'ai dit et je le redis alors forcément tout ce qui touche aux êtres surnaturels me fascine au plus haut point. À un point où ça en devient ridicule. Leur constitution si particulière fait presque rêver et ne parlons pas de leurs habiletés. Je ne dis pas que je suis un fanatique bizarroïde qui leur voue un culte  ou aspire devenir une créature quelconque à un moment de ma vie, mais je ne m'empêche pas de les approcher à mes risques et périls lorsque je croise leur route. Ça a tendance à m'attirer des ennuis, mais je n'y peux rien. C'est ainsi. Ça le restera sans doute jusqu'à ce que je m'enfonce si profondément dans les emmerdes que je ne serai simplement plus capable de m'en sortir.

Je suis loin d'être un modèle 'dieu grec' en matière d'anatomie. Je suis plutôt le modèle svelte aux muscles présents sans être saillants qui arrive à avoir un minimum de silhouette pas trop désagréable à regarder. Je reste loin du terme chétif, squelettique. D'autant plus que je suis loin d'être petit, il faut l'admettre. Je dépasse aisément d'une tête la majorité des gens. Mes traits ne sont pas réellement des plus définis non plus, pas proéminents ou imposants. Je suis la définition même du banal. Enfin sans compter ma taille presque démesurée et le brun si foncé de mes yeux qu'ils semblent presque noirs. À l'exception de ses deux détails qui peuvent sensiblement dérouter je n'ai rien de réellement exceptionnel. Je ne sors pas du lot. Je suis normal. Je garde mes cheveux coupés courts et coiffés un minimum, ma barbe tout aussi courte bien que présente. Je n'ai pas de marques particulières, de tatouages ou de piercings. Rien qui vienne à proprement parler souiller ma chaire qui sans être blanche n'est pas des plus foncée.

Niveau vestimentaire j'aime bien ce qui est décontracté pour changer de mes vêtements plus traditionnels qu'impose le travail à l'hôpital. Les complets et cravates c'est bien joli, mais ça reste une part entière du domaine professionnel en ce qui me concerne. Rien ne vaudra jamais un tee-shirt et un jean niveau confort même si par habitude je porte plus souvent une chemise qu'un tee-shirt.

Je suis venu. J'ai vu. J'ai vaincu. C'est ainsi que la vie de toute personne pourrait être résumée. On arrive en ce monde, on voit ce qu'il en est et on en termine de vaincre tous les défis qui ont été placés sur la route sinueuse de notre existence. Après tout est terminé. Le vide. Le néant. Le retour à la case départ sans récolter 200 dollars. C'est triste comme ça et ça semble se dérouler en un claquement de doigts. Ça passe trop vite, s'effrite entre nos doigts sans qu'on puisse y faire quoi que ce soit. Je ne voulais pas que ce soit que ça. Je ne voulais pas me contenter de fouler la surface de la terre et faire mon petit bonhomme de chemin en regardant loin devant moi sans voir tout ce que l'existence avait à m'offrir. Je ne voulais pas en ignorer toutes les subtilités. Je n'ai jamais voulu. Je voulais mordre dans la vie à pleine dents, même si gamin la chose impliquait surtout que mes dents ont mordu la terre et le sable. J'étais un enfant turbulent. Je n'arrivais pas à tenir en place un seul instant. Dès lors que j'ai été en mesure de marcher je me suis lancé et je n'ai jamais arrêté. Je voulais toujours en voir plus. Toucher tout, goûter tout quitte à en grimacer de dégoût parce que lorsqu'on découvre la vie on commence au tout début. Le point zéro. On ne sait rien, on apprend à mesure. On apprend à la première bouchée de bacon que c'est la chose la plus merveilleuse au monde malgré son apparence pouvant être douteuse. On apprend que courir peut entraîner une chute et que tomber ça fait mal, mais qu'on peut se relever. On apprend que le soleil et la lune ne se lèvent et couchent pas vraiment, que la terre tourne. Tant de choses. Une infinité de connaissances qui n'avaient cesse de se dévoiler devant mes yeux.

Nerd. Geek. Chouchou de prof. Appelez la chose comme vous voulez, mais c'est comme ça qu'on pouvait me désigner lorsque j'ai commencé l'école. Le petit élève beaucoup trop doué qui buvait la moindre des paroles que le professeur prenait plaisir à prononcer même si en dehors des heures de cours je ne tenais simplement pas en place. Certain parlait d'un don, d'autre d'une excellente capacité d'assimilation de l'information. Mes copains de classe disaient plutôt que j'étais le punching-ball de service. Ah oui j'en ai reçu des coups dans le ventre. Les jaloux. Ça a commencé tout jeune et ça a perduré avec les années jusqu'à ce que finalement j'atteigne ce niveau de scolarité que les petites terreurs se voyaient bien souvent refusés. Ce niveau de scolarité supérieur où nous pouvions faire nos premiers pas dans le monde des adultes, où nos parents avant nous étaient bien souvent passés. Mon père un médecin plus que passionné par son métier et ma mère une infirmière qu'il a bien évidemment à l'hôpital rencontré. Le couple parfait, heureux, banal tout autant que moi. Des parents qui m'ont pourtant partagé leur passion des soins parce que oui ce sont eux qui m'ont d'abord donné la piqure nécessaire pour me donner envie de pousser toujours plus loin.

Le corps humain, fascinant de par chacune de ses subtilités. Chaque veine, artère, nerf ou muscle qui influence sa totalité. Chaque parcelle de peau si vivante et si facile à blesser. Tout ce petit monde qui vient en notre personne s'animer, le mécanisme qui vient mécaniquement nous faire fonctionner alors que nous l'alimentons pour qu'ils ne viennent pas simplement nous lâcher. Une infinité de détails à découvrir et tant de possibilités de spécialités que je n'ai su faire mon choix. Je suis resté dans le général de la chose, poursuivant sur ma lancée de toujours pour m'approprier les nouvelles connaissances de ce domaine auquel j'avais décidé de dédier mon existence. Un domaine dans lequel je suis ensuite allé travailler et ayant la chance d'avoir un père plus que reconnu dans le domaine, dans l'établissement où il travaille depuis ce qui semble être une éternité, je me suis rapidement à mon tour taillé une place de choix où je travaille désormais.

C'est l'histoire de ma vie. Mon cheminement jusqu'à maintenant. Où sont donc les drames et les histoires à l'eau de rose, me demanderez-vous? Ne comptez pas sur moi pour vous parler fille, ou garçon même pour ce que ça vaut, parce que je n'ai simplement pas eu le temps pour ça. Des premières expériences 'sur le tas', mais jamais rien de sérieux pour bercer mon cœur bien loin d'avoir assimilé les principes de l'amour. Le drame quant à lui viendra bien assez vite. Il refera surface le moment venu, il m'assaillira d'une pensée assassine qui viendra me perturber. Peut-être serez-vous là. Peut-être pas. Après tout, nous vivons dans un monde dangereux peuplé de créatures toutes plus étranges les unes que les autres... Qui ne me donne que plus de boulot alors sans doute dois-je les remercier. Non? Nous verrons bien si un jour j'arrive à un peu plus les approcher, les examiner, pour combler cette curiosité maladive et mal placée. Vous voyez, elle n'est pas prête de me lâcher.